François Marion a exercé en tant que CEO de CACEIS de la création en 2005 jusqu’en 2016, avant de passer le relais à Jean-François Abadie qui a dirigé le Groupe jusqu’en 2023. A l’occasion du 20è anniversaire de CACEIS, nous avons recueilli leurs témoignages sur les moments marquants de leurs mandats respectifs, les défis rencontrés, et quelques anecdotes et conseils.
Quels ont été, selon vous, les moments clés ou les décisions stratégiques qui ont le plus contribué à la croissance de CACEIS au cours de ces 20 dernières années ?
François Marion: Sans aucun doute, la décision de transformer ce qui était une simple addition de services opérationnels en un véritable métier global, capable de posséder ses propres fonds de commerce et de gérer son compte d’exploitation. Nous avons également pris la décision stratégique de gérer en interne les opérations de marché pour nos clients, ainsi que le bilan, tant à l'actif qu’au passif, au lieu de sous-traiter cette gestion, malgré les fortes pressions qui nous déconseillaient de le faire. Enfin, le lancement du développement international de CACEIS a été un tournant majeur, car il a permis de renforcer notre crédibilité vis-à-vis de nos clients et du marché en général.
Jean-François Abadie: L’un des moments marquants a été d’avoir réussi à convaincre le groupe Crédit Agricole et Santander de joindre leurs forces pour positionner CACEIS comme un consolidateur majeur du marché. L’opération était complexe, mais elle a profondément transformé l’image de CACEIS auprès de nos clients, de nos équipes, et même de nos concurrents. Par ailleurs, l’acquisition des activités européennes d’asset servicing de RBC a été un autre tournant décisif. Elle a propulsé CACEIS dans le marché anglophone où nous étions auparavant perçu comme un acteur marginal, alors qu’il représente une grande partie de l’industrie.
Quels ont été les plus grands défis que vous avez rencontrés durant votre mandat ?
François Marion : L’un des plus grands défis a été de créer une équipe unifiée, solidaire et motivée, composée de femmes et d’hommes issus de différents fonds de commerce et de cultures très variées. Nous avons également dû affronter des crises économiques majeures, notamment la crise financière de 2008 et la crise de l’Euro entre 2010 et 2012, avec toutes les conséquences qui en ont découlé. Il fallait également savoir engranger les victoires avec humilité, tout en encadrant les échecs avec lucidité et sans jamais perdre de vue l'objectif à long terme : le développement et la pérennité du Groupe.
Jean-François Abadie : Pour moi, l’un des défis les plus importants a été de convaincre le groupe Crédit Agricole que CACEIS pouvait non seulement être un atout pour son image mais aussi un contributeur significatif à son résultat global, même s’il ne demandait qu’à être convaincu.
Puis bien sûr, il y a eu la crise du COVID, que nous avons passée sans dommage, grâce à l’engagement et l’adaptabilité exceptionnels de nos équipes. Il faut mentionner aussi l’intuition de Joe Saliba, qui a doublé la bande passante pour le télétravail un mois avant la crise, un choix stratégique qui nous a permis de continuer à fonctionner sans accroc.
Enfin, tenir les coûts sous contrôle lors de la première phase d’expansion fut un défi de taille, ce qui a mis une pression considérable sur les équipes, mais cela était indispensable pour maintenir la confiance de nos actionnaires et garantir la dynamique de croissance de CACEIS.
Que retirez-vous personnellement des années passées à CACEIS et de votre expérience en tant que CEO ?
François Marion: Je ressens beaucoup de fierté et de joie d’avoir été très soutenu par les équipes motivées de CACEIS qui ont joué un rôle essentiel dans la réussite de ce projet ambitieux, qui n'était pas gagné d’avance. Il y a eu beaucoup de stress aussi, car à l’époque, notre métier était encore mal compris et mal perçu par les actionnaires, ce qui a engendré une certaine solitude, notamment lorsque les décisions stratégiques étaient difficiles à prendre.
Jean-François Abadie: Ces années à CACEIS font partie des trois périodes les plus heureuses de ma vie professionnelle aux côtés de mes expériences en Espagne et au Luxembourg. Travailler avec des experts d’une telle compétence, qui m’ont appris un métier que je connaissais peu, et collaborer avec une équipe de management unie par un désir collectif de progrès a constitué une phase très enrichissante. Il y a aussi eu l’opportunité de passer le flambeau à Jean-Pierre Michalowski avec de belles perspectives, ce qui a été extrêmement gratifiant.
Avec le recul, y a-t-il une leçon ou un conseil que vous aimeriez transmettre à la nouvelle génération de dirigeants pour les 20 prochaines années ?
François Marion:Je suis convaincu que la nouvelle génération de dirigeants sera extrêmement compétente et n'aura pas nécessairement besoin de conseils d’anciens pour continuer à exceller. Ils sauront garder leurs clients, garantir le bien-être des collaborateurs et maintenir un œil vigilant sur les coûts.
Jean-François Abadie: Je pense qu’à CACEIS comme ailleurs, il existe plusieurs styles de management qui peuvent être complémentaires et contribuer au succès de l’entreprise. Alors le seul conseil que je me hasarderais à donner serait le suivant : soyez vous-même ! C’est en étant authentique que vous pourrez inspirer vos collaborateurs et gagner leur confiance.
